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Sunday 13 January 2013

Les Cubains autorisés à voyager hors de leur île

La direction communiste s'apprête à assouplir les restrictions qui pèsent depuis un demi-siècle sur la population de l'île. Comme tout Cubain, la vendeuse de cacahuètes de la rue Respublica à Camaguey n'a qu'un mot à la bouche: «Voyager.» Cette mulâtresse qui rêve d'ailleurs apostrophe un client. «Désormais, avec un passeport cubain, tu vas pouvoir voyager partout dans le monde», insiste-t-elle. «Et le visa?», questionne son vis-à-vis. «Un simple papier. Un détail», répond-elle.
Les Cubains vibrent pour une nouvelle révolution, celle du voyage. Elle a été annoncée en octobre par le Granma, l'organe officiel du Parti communiste cubain. Avec un titre: «Cuba actualise sa politique migratoire».
À compter de ce lundi 14 janvier, les autorités suppriment la demande de permis de sortie du territoire ainsi que la lettre d'invitation remplie par un étranger qui étaient nécessaires jusqu'ici pour sortir du pays. Un passeport et un visa délivré par le pays de destination suffiront. Les voyageurs pourront quitter l'île pendant deux ans renouvelables au lieu de onze mois actuellement, et conserver la résidence cubaine. La perte de cette dernière entraînait la confiscation de sa maison.
Après la politique d'ouverture économique de Raul Castro, l'annonce était attendue. «J'aimerais partir en Italie, au Canada ou à Miami», conte Yaimara, 23 ans. L'étudiante précise: «Je vais abandonner ma dernière année de maîtrise en éducation. Si je suis diplômée, je devrais effectuer deux années de service social avant de pouvoir partir.» Elle roule des yeux: «Le principal est que je trouve maintenant un yuma(“étranger”) qui paiera mon voyage», dit-elle. À l'instar des personnages du roman de Wendy Guerra, Tout le monde s'en va, la jeunesse veut partir. «Vous pouvez venir à Cuba sans restrictions. Moi aussi, je veux aller dans votre pays», dit Osmany, jeune sculpteur.
Les quadragénaires se montrent plus méfiants. «Il faut attendre pour voir qui va pouvoir sortir et comment. Notre peso convertible ne vaut rien à l'étranger. Comment est-ce que je vais vivre à Rome ou à Toronto si on n'accepte pas mon argent?», se questionne Roberto, commerçant. Les agences de voyages sont peu nombreuses et le prix d'un vol pour les États-Unis atteint deux années du salaire d'un ingénieur. Si les jeunes veulent quitter le pays pour de bon, les plus âgés préfèrent un aller-retour. Marisbel et Vladimir iront enfin voir leur fils qui habite New York depuis douze ans. «Juste pour un mois puis nous reviendrons. Notre commerce nous permet de bien vivre. Ce ne serait pas si facile aux États-Unis», dit Vladimir, propriétaire d'un gîte.

Vague d'émigration massive

Le secrétaire du Conseil d'État, Homero Acosta, a assuré: «Cuba ne cherche aucun certificat de bonne conduite avec ces changements.» Si, pendant des décennies, les émigrants ont été considérés comme des traîtres à la patrie et traités de «vers» par le gouvernement, Acosta tempère: «On est passé de l'émigration d'individus, dont les motifs étaient politiques, à une émigration liée à des déterminants économiques.»
La décision des autorités est pragmatique: l'envoi d'argent de l'étranger aux familles constitue, avec le tourisme, la principale source de revenus de Cuba. Une vague d'émigration massive augmenterait ces entrées d'argent. Au demeurant, les difficultés administratives pour quitter l'île n'ont jamais empêché les Cubains de le faire illégalement. Le nombre de balseros(fuyards sur des embarcations de fortune) partis aux États-Unis via le Mexique ou l'Amérique centrale a fortement augmenté ces dernières années.
La fin des autorisations de sortie du territoire va provoquer un afflux de demandeurs de visas dans les missions diplomatiques. «Il faudra qu'ils obtiennent ces visas des ambassades étrangères pour sortir et ce n'est pas gagné», confiait il y a peu un diplomate occidental, avant d'ajouter: «Certaines choses ne changeront pas. Nous ne délivrerons pas de visa à une jeune fille de 20 ans qui veut vivre avec son fiancé étranger de 70 ans.»
Si la nouvelle mesure génère un exode, les autorités auront toujours la possibilité de refuser la délivrance d'un passeport pour des raisons politiques. Le Granma a déjà prévenu qu'il n'y aurait pas de fuite des cerveaux: «Les mesures destinées à préserver le capital humain créé par la révolution seront maintenues, face au vol de talents auquel se livrent les puissants.»Une intransigeance qui provoque la grogne des intellectuels. Hilda, ingénieur, s'indigne: «Dans ce pays, ce sont toujours ceux qui ont fait de longues études qui sont le moins bien traités. Je n'aurai pas le droit de partir.» Les nouvelles mesures ne signifient pas la fin des balseros, mais elles vont alimenter la plus forte émigration légale depuis 1958. Aux yeux de La Havane, Washington portera la responsabilité des refus de visas, comme des naufrages des balseros qui en découlent.
.lefigaro.fr
13/1/13

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